Article paru dans Aires Libres n°12 – décembre 2012
Tout le monde connaît le jeu de pétanque. Mais saviez-vous qu’il s’agit de l’adaptation du jeu de boules ? En effet, à l’origine, le jeu se pratiquait sur un terrain de 10 à 15 mètres de long. Le joueur, avant de lancer sa boule, devait prendre son élan et réaliser 3 sauts. Autant dire qu’il fallait être en bonne santé pour pratiquer ce sport.
En 1907, Jules Hugues, champion de la discipline, se voit contraint d’abandonner son loisir favori en raison des rhumatismes qui l’empêchent de rester debout et de se mouvoir aisément. Il se retrouve à contre-cœur spectateur. Ses équipiers modifient alors les règles en opérant trois changements. Le joueur lance sa boule sans élan. Il place ses pieds joints dans un cercle. Il joue sur un terrain plus petit. Ces trois modifications vont rapidement être adoptées par de nombreux joueurs. Et voilà que la pétanque actuelle – le jeu de « pés tanqués » (les pieds joints en provençal) – est née.
Hors texte
« La pétanque, ce n’est pas spécialement un sport de vieux comme beaucoup le pensent.
Il y a beaucoup de jeunes qui y jouent. »
Olivier (éducateur et entraîneur de boccia)
Fin du hors texte
Reprise du texte principal
Que se serait-il passé si Jules Hugues avait eu, non pas des rhumatismes, mais des problèmes de vue ? Ses amis auraient sans doute trouvé une autre parade pour intégrer leur grand joueur dans les compétitions…
Aujourd’hui, des personnes déficientes visuelles jouent des parties de pétanque adaptée. Le terrain ressemble à une grille de combat naval : il est quadrillé en 7 lignes et 7 colonnes. Le joueur cale ses pieds sur un pas de tir en forme de T afin d’être toujours bien placé au centre. L’objectif reste le même : lancer ses boules (les mêmes que celles utilisées pour la pétanque traditionnelle) le plus près possible du cochonnet. Les points sont calculés en fonction de la proximité avec ce dernier (25 points si elle le touche, 15 points si la boule est dans la même case que le cochonnet, 5 si elle se trouve dans une case adjacente…).
Pour avoir une représentation plus précise de la partie, les joueurs disposent d’un gabarit, c’est-à-dire un modèle réduit du terrain sur lequel sont piquées des punaises correspondant à chaque boule. Pour qu’aucun participant ne soit avantagé, chacun porte des lunettes occultantes. Les points sont comptabilisés par un arbitre voyant, qui met aussi à jour le gabarit.
Et si Jules Hugues avait eu des problèmes de motricité aux membres supérieurs ? Quelles astuces ses amis auraient-ils pu déployer ?
Ils auraient certainement joué à la boccia ! Ce sport est devenu une discipline paralympique et lors des derniers Jeux à Londres, une équipe belge a d’ailleurs remporté la médaille de bronze dans une des épreuves (paires BC 3).
Hors texte
« Ce que j’aime dans la boccia, c’est que je peux participer et jouer. C’est moi qui dirige, qui décide. »
Sophie (jeune femme IMC, joue avec une rampe et un aidant)
« Dans la boccia, c’est le sport en lui-même que j’aime. Ça fait travailler mes membres supérieurs
et ma concentration, tout en jouant. »
Pascal (homme traumatisé crânien, joue de manière autonome)
« Il n’y a point de rhumatismes et d’autres maux semblables que l’on ne puisse prévenir par ce jeu :
il est propre à tous âges, depuis la plus tendre enfance jusque la vieillesse. » Rabelais
Fin du hors texte
Reprise du texte principal
La boccia est une épreuve de précision et de contrôle musculaire pour ces athlètes handicapés. Les différences avec le jeu traditionnel de pétanque sont plus nombreuses. Elle se joue avec des boules en cuir remplies de petites billes, plus petites et plus légères afin d’être plus préhensibles.
Deux équipes (de un, deux ou trois joueurs) s’affrontent au cours d’un match. Conventionnellement, les rouges s’opposent aux bleus. Les douze boules sont ainsi aisément reconnaissables. Le cochonnet, aussi appelé jack, est blanc.
La zone de lancer est séparée en 6 couloirs dans lesquels se positionnent alternativement les joueurs de chaque équipe. Afin de ne favoriser personne, les compétiteurs changent d’aire à chaque manche. Dans les compétitions, le terrain (de 12,5 mètres sur 6) est d’office situé en intérieur.
Le joueur effectue le lancer selon sa dextérité.
Lors des compétitions officielles, en fonction de leur degré de motricité, les athlètes sont répartis en 4 catégories :
> la classe BC 1 est réservée aux personnes qui n’ont que très peu, voire pas, de motricité des membres supérieurs. Les joueurs peuvent être aidés d’un assistant. Ce dernier est présent pour stabiliser ou ajuster le fauteuil roulant du sportif. Il peut également passer la boule au joueur.
> le groupe BC 2 n’accepte pas les assistants. Les athlètes ont un handicap modéré des membres supérieurs et jouent de manière autonome.
> la catégorie BC 3 regroupe des sportifs avec de grosses difficultés motrices. Ils utilisent tous au moins un accessoire : une rampe pour faire glisser la boule dans la bonne direction, un dispositif d’assistance fixé sur leur tête/leur bras/leur bouche pour donner l’impulsion à la boule… Un assistant peut aider le joueur. Dans ce cas, il se positionne dos au terrain et ne peut pas parler avec son athlète qui reste le seul maître de ses tirs.
> la classe BC 4 est destinée aux joueurs ayant des problèmes moteurs qui ne sont pas liés à une déficience cérébrale. Ils ont toutefois des grosses difficultés de mobilité au niveau des bras. Ces sportifs n’ont pas le droit d’être aidés par une tierce personne.
En conclusion, nous constatons que la pétanque est un jeu s’adaptant particulièrement bien à tous : jeunes, aînés, personnes valides ou moins valides.
Le matériel et les équipements nécessaires sont peu nombreux et relativement bon marché. Tout le monde peut assez facilement y jouer. De plus, elle se pratique sur quasi tous les terrains. Au besoin, les règles peuvent être simplifiées afin de permettre aux personnes handicapées mentales de profi ter de ce sport. Certaines préfèreront jouer à la boccia pour des questions de concentration, de manipulation des balles et de sécurité.
En définitive, s’il existe différentes manières de jouer, le jeu permet à tous de se faire plaisir ! Que demander de plus ?
Sarah Logan & Anne-Sophie Marchal
Hors texte
« Les règles officielles sont très strictes donc ce n’est pas évident. La boccia c’est avant tout un plaisir
donc on s’adapte en fonction des joueurs. » Olivier (éducateur et entraîneur de boccia)
Fin du hors texte